Alors voilà, je suis heureuse, il me rend

Alors voilà, je suis heureuse, il me rend heureuse. C'est bizarre comme sensation, parfois je lui en veux, sans savoir pourquoi. Quand il me prend dans ses bras pour dormir, qu'il m'embrasse encore et encore. Quand il me dit que je suis belle et qu'il me prend la main. Quand il rencontre mes parents et que ça se passe tellement bien qu'ils finissent par parler plus avec lui qu'avec moi. ça me plait, ça me rend fière, je suis fière qu'il m'accorde son attention, son amour - peut-être - ... Mais alors pourquoi quand on est serrés dans un lit, je ne rêve que de solitude? Sans doute parce que je n'avais jamais vécu ça avant ? Parce que jusque là on ne m'avait pas aimée, on ne m'avait pas choyée. On n'avait pas traversé la France pour pouvoir me voir deux petits jours. Deux petits jours qui ont filé trop vite. Et ce sentiment de gêne et de hargne s'évanouie, se dissipe comme un nuage de fumée et est remplacé par une affection brute et une vive reconnaissance. Parce que quand je parle de homards dans un jaccuzi ou de bébés crocodiles qui dansent pendant mon sommeil, il trouve ça mignon. Parce que je peux me maquiller devant lui ou même ne pas me maquiller du tout, il me trouve belle. Parce que l'odeur du tshirt qu'il a oublié chez moi me donne des crampes d'estomac et une boule d'émotion dans la gorge, et que, plus que tout, j'ai peur de le perdre. C'est neuf, c'est tout nouveau, tout frais, encore presque vierge -presque-, mais c'est beau. Et que ça me fait peur quand les vieux fantômes viennent roder autour de nous... Je ne veux plus rien savoir du reste du monde, la seule chose qui importe, c'est ce parfum et ce sourire en coin, un sourire qui fait des rides sur les joues et qui fait pétiller ses yeux bleus. La seule chose qui importe, c'est quand il glisse ses doigts dans mes boucles et qu'il embrasse mon front. C'est le respect que personne d'autre ne m'avait jusqu'ici témoigné et le dégoût que j'éprouve à l'idée de voir d'autres garçons. C'est nos têtes à têtes silencieux et nos fous rires délurés. C'est escalader la grille d'un parc la nuit ou s'allonger au soleil. C'est lui présenter des gens importants pour moi, et esperer qu'ils deviennent importants pour lui. C'est toutes ces choses completement nouvelles pour moi, que je veux lui réserver. C'est la peine qui me prend quand je réalise la distance et les limites que celle-ci impose à notre relation. C'est le fait de me réveiller avant lui et de le regarder dormir avec une envie incontrolable de me jeter sur lui.